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SACHA Muriel Robin
Bruno, tu vas dans ta chambre réveiller ton petit ami, hein ; ton père va rentrer du P.M.U… (Elle sort de scène) C'est fait, ce n'est pas fait ? Allez ! (Elle rentre sur scène avec une robe à la main) Ah, je vous ai entendus rentrer cette nuit… Enfin cette nuit… Ce matin, je devrais dire… (Elle se déplace sur scène) Non, vous n'avez pas fait de bruit… (Elle saisie quelque chose) Mais moi, tu sais ; à trois kilomètres, je peux t'entendre respirer… Alors, hein… Non, après j'ai plus rien entendu… Oh et puis même si j'avais entendu quelque chose, je ne le dirais pas. Je ne me mêle pas de ta vie privée… (Elle se met à questionner son fils très rapidement) J'le connais ? Il s'appelle comment ? Il a quel âge ? Il est français ? Il est mignon ?… Sacha ? Et ben, on n'avait pas eu ça encore à la maison… Ouais, Sacha c'est chouette, hein… Ben déjà « Sacha », ce n'est pas facile à dire ; mais « Sacha c'est chouette », alors pfff ! (elle fait un geste de la main comme pour dire : « On s'en fiche ! ») C'était bien « le Sparagus » ? Hein ? Oui, « le Spartacus » ! Enfin, c'est pareil… Hein ?.. Oui, vous êtes allés au « Différent » ! Oh oui, et ben remarque, t'as raison ; à force d'aller tous les jours au même endroit… (Elle s'assoie sur la chaise) On voit toujours les mêmes têtes, hein… Et toi qui aime bien le changement… (Elle rigole bêtement) Et ben qu'est-ce que je fais ? Je recouds les pressions de ta robe Dalida ; voilà ! Oh ben t'en as fait sauter deux à ton anniversaire ; je n'ai pas envie que tu sois ridicule la prochaine fois, hein ! (Elle coud la robe tout en discutant avec son fils) Tu sais que tu l'imites de mieux en mieux ? Et ton père qui n'a pas voulu que tu fasses du théâtre ; et ben si ce n'est pas du gâchis, ça ! Ah ben je ne sais pas comment tu fais là, avec la main… (Elle fait un geste précieux de sa main) Mais moi, écoute ; j'la vois, Mme Dalida !.. Enfin tu connais ton père, hein ?… oh, et puis il est hors de question de lui parler de ça un jour ! Mais ce n'est même pas qu'il est contre ; c'est qu'il ne sait même pas que ça existe ! Ça lui ferait beaucoup trop d'informations à digérer d'un coup !.. Et puis c'est notre secret… Moi, je trouve que c'est très bien comme ça ! Déjà que l'autre jour, il a commencé à poser des questions. Remarque, il a été bien reçu… « C'est les vêtements de sa copine, ça pose problème ? »… Tac ! J'l'ai mouché !.. « J'vais t'dire non elle n'en a pas besoin plus souvent !- Elle s'habille bizarrement !- Elle s'habille comme elle s'habille ! Tu t'es vu, toi ? T'as vu ta touche ! »…J'vais t'dire, j'l'ai plus entendu ; ça lui a claqué le… Hein ! (Elle trace un trait de son doigt sous sa gorge, comme pour dire : « Couic ! ») Seulement maintenant, résultat des courses ; la copine, là… Il s'est mis en tête de la voir ! Ah ça, c'est encore autre chose, hein ! D'ici qu'on soit obligé de lui monter un bateau… (Elle se lève) Ben c'est ce qu'on va faire, Bruno ; on va lui monter un bateau ! Voilà ! T'as bien une copine dans ton entourage ? Hein ? Ne t'as pas une copine dans ton entourage ? Non, une copine qui… Non ? Hein ? Une fille, une vraie fille ! S'il te plaît, bon… Hein ! Et ben, fais-la venir un Dimanche ; on lui demandera de jouer le jeu. Ça nous le calmera… Hein ? Oui ? Et ben qu'elle vienne avec, elle vient Dimanche avec sa p'tite copine… Non, on la fera passer pour meilleure amie ; ça passera tout seul !.. Ou pour la petite copine de ton petit copain ? Faudra bien se mettre d'accord pour moi avant, parce que… (Elle fait des gestes avec ses doigts, des mimiques et des onomatopées comme pour dire : « Je risque de tout me mélanger ! »; puis elle retourne s'asseoir) Mais sans parler qu'au-delà de rassurer ton père, moi j'trouverai ça très amusant ! Mais faut bien calibrer notre petite affaire, hein !… On préparera quand même une petite valise ; parce que ton père, si y pige… La porte, on a intérêt à se l'enquiller ! Tu sais maintenant que j'y pense, ce n'est pas d'aujourd'hui qui s'méfie, ton père ! Et quand t'étais petit, il t'appelait la chochotte ! (Elle rigole bêtement à nouveau) Hein ? Oh, ce n'était pas méchant ; c'était ses mots à lui, hein ! Ben, oh ! Dis donc ! Ça aurait pu être pire ; il ne t'a jamais traité de lopette ! Et puis dernièrement, je lui ai quand même rafraîchi la mémoire ; on a toujours voulu avoir une fille ! Alors ? Alors on t'a eu, et on n'a pas hésité une seconde ; on t'a gardé, hein ! Alors, s'il était honnête, il admettrait comme moi, qu'avec toi, on a le beurre et l'argent du beurre ! Et le ? Cul de la crémière ? Je ne connais pas l'expression ! (Elle rigole bêtement à nouveau) T'en as bien de la chance d'avoir une mère comme moi, hein… Tu ne dis rien ? Et ben tu pourrais dire quelque chose, hein ! Et bien viens m'embrasser ! Et ben j'suis la seule femme au monde que tu embrasses ; alors j'te permets d'en profiter ! ( Elle tend sa joue) Quoi ? Tu m'as mis du rouge ! Et ben ce n'est pas grave… (Elle s'essuie avec le revers de sa main) Tu sais qu'ce n'est pas désagréable, pour une mère… De sentir qu'elle est la seule femme dans la vie de son fils, hein ! Oh ben j'sais… J'sais bien… Peut-être qu'un jour… (Elle s'arrête de coudre et se lève) Tu vas rencontrer, oui… Oui ben ça c'est sûr, hein ! On ne sait jamais ; tout est possible ! Bon, ben dis donc… (Elle passe sa tête dans l'ouverture de la robe) Parti comme c'est parti, hein… On a le temps de voir venir, hein… Mais moi, je s'rai ravie… (Elle sort sa tête de l'ouverture de la robe) Ravie qu'un jour, tu me présentes une jeune fille. Ah mais, je s'rai ravie… D'autant plus qu'alors, tu vois ; les jeunes filles maintenant, c'est ce que j'entends dire… (Elle sort de scène) Il paraît qu'elles sont très attirées par les péd… Par les lop… Par les tap… Par les… Par les… Zut ! Oh ! Oh ! (Elle revient sans la robe) Par les garçons sensibles, voilà ! Et de ce côté-là, tu ne nous as jamais déçus… (À elle-même) Allez, j'fais ma chaise, moi… (Elle commence à nettoyer sa chaise, puis s'arrête) C'est quoi ce bruit ? Oh, ben c'est ton ami ! (Elle s'avance vers Sacha avec une démarche de pimbêche, les mains écartées) Bonjour Sacha… (Elle rigole bêtement à nouveau) Je suis l'amie de mon fils !… Heu ! Je suis la mère de mon fils ! (Elle rigole bêtement à nouveau) Voilà, ça a été ? Il manquait rien ? Tout bien, tout bien ? Bon d'accord ! (À Bruno) Hein ! Bruno, t'as trouvé dans ton tiroir… Les moufles ! (À Sacha) C'est un code pour les préservatifs quand son père est là ! (À Bruno) Hein ! Dis moi d'ailleurs, il faudra peut-être… On va arriver à l'été, faudra peut-être penser à autre chose ; parce que ton père, les moufles… (Elle fait un geste avec ses deux mains au niveau de son cou, comme pour dire : « Ton père va finir par se douter de quelque chose ! ») C'est normal, hein ! Hein ? Non, non ! C'est moi qui y vais, parce que j'ai pas envie qu'on t'voit tous les deux jours à la pharmacie ! Avec, moi, ça passe ! Avec, moi, ça passe ; ils sont aux p'tits soins ! A la guerre comme à la guerre ! (à Sacha) J'ai raconté que son père était séropositif ! Oui et ben quand j'arrive, crac ! Ils sont tous au garde à vous ! Ben comment elle fait, votre mère ? Ah, elle ne sait pas ! Oh, ben c'est bien… Enfin c'est bien… (Elle reprend son nettoyage) C'est comme ça ! Et votre père ? Il le sait pas, ah oui ! Ah, il est mort ! Oh, je n'ai pas compris, pardon… Ah, j'ai encore perdu une occasion d'la fermer, moi !.. Oh et hein ! Avec mon fils, on est très complice ! (à Bruno) Hein, ma Dali ! (Elle commence à chanter « Gigi l'Amoroso », puis à Sacha) Hein ! Il ne vous l'a pas fait ? Non, hein ? Qu'est-ce qu'il vous a fait ? (Elle a une expression, comme si elle venait d'entendre quelque chose qu'elle n'aurait pas dû entendre) Non, vous n'avez pas compris ; qu'est- ce qu'il vous a fait... comme imitation ? Hein ? Mylène Farmer ! Oui, il la fait bien aussi, oui ! (Elle commence à chanter « Sans Contrefaçon ») Moi aussi, j'la fais bien… (Elle rigole bêtement à nouveau) Ah, pour tout vous dire ; moi, ça fait qu'un mois, moi, que je sais… Ah non, non ; pas pour Mylène Farmer !.. Ça fait qu'un mois que je sais qu'il… Qu'il va aux champignons ! Hein ! Oui, il va aux champignons ; il aime ça, (Elle rigole bêtement à nouveau) Hein ? Oh, j'avais des doutes bien sûr ; j'avais des doutes… Ben ça se voyait un peu venir, hein ! Il aimait la poésie, la peinture, il était jamais vulgaire… Et y se battait jamais ! Alors c'était un peu parti pour ça, là, quand même ! Mais ça fait qu'un mois que… J'vais vous dire, c'est marrant ; ça n'a rien changé, au contraire ! Ça nous a même rapprochés… (À Bruno) Hein ! Ma Dali ! (À Sacha) Curieux la vie, hein ! C'est comme ça, enfin ! Hein ! J'vous ai fait du café, hein ! Attention Sacha, c'est chaud ! (À Bruno) Hein oui, ben le temps de le dire, il s'est brûlé ! Qu'est-ce que tu veux que je te dise ? (À elle-même) Bon la chaise, ça va, c'est bon… (À Bruno) Bon, sinon quand même, vous avez un peu dormi avec tout ça ? Bon, hein, oui… Oh ben, moi j'ai bien dormi ; mais j'ai rêvé bizarre ! Figures-toi qu'j'étais avec ta tante Claudette… Bon jusque là, ça va… Et on venait t'annoncer nos fiançailles… (Elle rigole bêtement à nouveau) Ah non, non ! C'était pas érotique, c'était officiel !.. Oh remarquez, ça valait son jus ; on se tenait par la main comme ça… (Elle montre la position des mains) Et on arrivait j'sais pas où ; et alors tout le monde s'est mis à nous jeter… Non ce n'était pas du riz ; des petites saucisses cocktails ! (Elle fait des gestes de jeté) Et ben ça fait mal ces p'tites… Ouh la, la, Si, si… Remarquez, moi je les adore, j'en ai quand même chopés deux ! Hop ! Hop ! … (Elle fait semblant de gober quelque chose) Toujours ça de pris ! (Elle rigole bêtement à nouveau, puis à Sacha) Remarquez à chaque fois que je rafistole ses robes… (Elle fait des gestes et des mimiques, comme pour dire : « Je fais des rêves bizarres ») Oh ben non ; après… Après on se retrouvait dans une rue… Non, non ! La normale, la rue... Heu… hétéro ! (À Bruno) Si attends ; y avait un grand panneau publicitaire pour les… Les Wonderbras ! (À Sacha) Vous savez, les soutiens-gorge qui… Qui… (Elle se serre les seins) Et ben oui, oui vous savez puisque j'vois que… (Elle fait des mimiques, comme pour dire : « J'ai remarqué votre soutien-gorge ! », puis à Bruno) Et ben le mannequin qui le portait, je te le donne en mille ; c'était ton père ! Il avait une touche ! Ouh la ! Parce qu'avec les p'tites moustaches, les p'tites oreilles, les p'tits… Oh non ! Ouh la ! Y tirait une tronche ; on avait dû le forcer... Parce qu'alors, ça ne donnait pas envie de l'acheter ! Oh, hein !.. oh non, quand je revois ton père avec ses roploplos ! (Elle se serre les seins puis rigole bêtement à nouveau) Ah ben tiens, voilà ton père ! Ah !.. (Elle a un rire gêné, puis à son époux) Juste j'termine, Chéri… (À Sacha et Bruno) Alors… (Elle fait des gestes et des mimiques, comme pour dire : « Les seins de ton père ont explosé ! ») Et on ne l'a plus jamais revu le… (À son époux) Hein ? Tu ne la connais pas ? J'te la raconterai ce soir, hein ! (À Sacha et Bruno) Allez les deux, s'il vous plaît, merci ! Voilà, allez on y va à la soupe ! Non ça y est, c'est allé ? Filez les jeunes ! (À son époux) Vas-y en kit… Heu… J'arrive, hein ! (À Bruno) Bruno, Bruno ! Si tu vas aux champignons, prends tes moufles !
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